Véronique, 50 ans, et Patrick, 57 ans, sont tous deux séropositifs. Ils vivent en couple depuis neuf ans. Ils décrivent leur vie de famille au quotidien et le courage qu’ils tirent l’un de l’autre. Voici leur témoignage. Patrick est pâtissier, son métier est essentiel dans sa vie, c’est un moteur au quotidien. « Pour moi, c’est important de travailler, ça m’évite de penser à m’arrêter. »
Véronique ne travaille plus depuis 2006. Pour l’instant, elle se consacre à sa vie de femme au foyer. « Je prépare le repas du midi pour mon p’tit homme et mon fiston, et je m’occupe de la maison. » Véronique et Patrick se sont rencontrés par le biais de petites annonces dans un journal destiné aux personnes concernées par le VIH. Tous les deux aspiraient à une vie à deux, mais ils ont voulu prendre le temps de se connaître, de se découvrir. « On a discuté six ans au téléphone avant que je la rencontre ! », sourit Patrick. Patrick est un père et un grand-père heureux. « J’ai 4 petits-enfants d’un seul enfant. » Le fils de Patrick est séronégatif. « J’ai eu la chance qu’il ne soit pas malade. J’ai été contaminé dans les années 1984/85, et mon fils est né en 1985. » De son côté, Véronique est également maman d’un garçon de 22 ans. Patrick et Véronique se sont construit une vie de famille. Une famille recomposée, comme beaucoup d’autres. Après avoir été quatre, ils ne sont plus aujourd’hui que trois, après le départ du fils de Patrick. Véronique se réjouit de l’énergie qu’a su déployer Patrick. « Je suis contente du challenge, c’est vrai que tu es un battant. » Patrick est un homme énergique. Il vit, il travaille, mais il adopte une attitude prudente lorsqu’il s’agit de communiquer. « Ça fait vingt-cinq ans que je suis malade, mais bon, ça ne se voit pas, ce n’est pas marqué sur mon front, il n’y a que les médecins qui savent. Il faut apprendre à pouvoir le dire, on ne peut pas le dire comme ça à tout le monde. Il y a encore une grosse discrimination. » Pour lui, « les séronégatifs ont encore un très grand travail à faire, parce qu’on n’est pas acceptés complètement ». Pas de pessimisme pour autant, Patrick se tourne vers l’avenir. « Mon dernier projet de vie, c’est ouvrir une boulangerie avec mon fils dans le Midi, et ça me tient énormément à cœur. Si je réussis à le mettre en place, ça sera encore un combat gagné face à la maladie. » Patrick se souvient que, vingt-cinq ans auparavant, on considérait que les personnes séropositives étaient condamnées à voir leur espérance de vie réduite. La plupart étaient résignées à n’avoir ni enfant ni petit-enfant. « Je suis un privilégié, déclare-t-il . Je suis un privilégié, parce que je sais que tout le monde n’est pas comme moi . » Véronique est favorable à ce projet professionnel et familial. C’est un rôle de soutien qu’endosse le couple, comme dans n’importe quelle famille. « Je trouve ça très bien aussi pour Nicolas, sa petite femme et ses enfants, parce que c’est vrai que les jeunes, il faut les aider. » La maladie n’a pas droit de cité dans ce projet qui réunit avant tout un père et son fils. « Il y a plusieurs années que Patrick pensait à ça. (…) Cet été, ils ont fait un grand pas. Ils ont beaucoup avancé dans le projet et, maintenant, il faut souhaiter que ça se concrétise. » Un projet professionnel qui va, en plus, permettre à Patrick de se rapprocher de ses petits-enfants, de profiter d’eux, de les voir grandir. « On assume notre rôle de grands-parents. Ce n’est pas parce qu’on est malades qu’on n’a pas le droit d’être grands-parents. » Patrick refuse d’être soumis à la dictature de la maladie : « Il ne faut pas qu’elle nous empêche de vivre. » Et l’arme de Patrick, c’est l’amour : « Moi, je vis, je travaille, j’aime. J’ai une femme que j’aime énormément, c’est elle qui me fait beaucoup avancer, c’est elle qui me permet deconstruire tout ça . » Pour Véronique, les choses sont claires : « Patrick m’apporte une certaine sérénité. Je pense que c’est une sorte de complémentarité. » Patrick et Véronique sont à la fois un couple et une équipe. « Le combat est moins dur pour moi. Le combat est moins dur en étant tous les deux malades, on s’apporte mutuellement », conclut Patrick. Dr Gilles Force, médecine interne, Institut Hospitalier Franco-Britannique, Levallois-Perret (92). « Ce que je peux dire de ce couple, Véronique et Patrick, c’est que c’est un couple amoureux. Ils se sont rencontrés alors qu’ils étaient séropositifs et, aujourd’hui, ils ont une vie affective épanouie. Ils ont la chance d’être en connivence parfaite avec leurs enfants, de faire des réunions de famille où ils ont le bonheur de retrouver leurs petits-enfants. Il y a une chaleur incroyable qui se dégage de leurs mots.Ils ont eu des difficultés dans leur traitement anti-VIH par le passé, mais le fait d’être deux, c’est formidable parce qu’ils peuvent s’entraider, ils le disent bien. Même moi, j’ai favorisé cette entraide en leur proposant la même trithérapie, c’est quelque chose que je fais assez régulièrement, ça leur permet d’être encore mieux dans la fusion. Là, on voit un exemple de couple qui a su communiquer le fait qu’ils soient infectés par le VIH à leurs enfants, peut-être pas encore à leurs petits-enfants, mais ils sont vraiment dans l’ouverture aux autres, ce qui leur permet de faire quelque chose avec eux.On pourrait dire, comme pour toute personne, qu’avec un traitement adapté, finalement, on n’est pas malade, on n’est pas handicapé, on a juste besoin de vivre avec le VIH, ce qui est différent. Donc, on peut espérer avoir une vie de couple, avoir une vie normale, avec des projets professionnels et, finalement, s’épanouir complètement. Comme Véronique et Patrick, qui ont trouvé leur équilibre dans une vie à deux, avec leurs enfants, et ça c’est formidable. » La section commentaire est fermée.
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Mars 2017
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